J'ai eu le plaisir de travailler sur le film La forme des nuages, réalisé par Guillaume Ligoule, en décembre de l'an passé. Un projet ambitieux tourné pendant deux semaines au sein du Prieuré de Buffon, dans l'ouest de la Côte d'Or.

Dans son histoire, Guillaume abordait entre autre la recherche d'une retrouvaille dans l'ambiance onirique d'un hôtel reclus. Dès ma première lecture, j'ai été inspiré par une sensation similaire à celle perçue devant The Others d'Alejandro Amenábar. J'ai eu envie d'imaginer le film comme l'histoire de fantôme qu'elle n'est pas, frontalement. Sans chercher à reproduire les tropes du genre, j'ai gardé cette idée dans un coin de ma tête le long de la préparation et lors de notre première confrontation avec le décor réel.

Guillaume m'a présenté sa vision, foisonnante d'idées de plans, de références de lumière et de couleur. Alors que nous déambulions dans les jardins et les différentes pièces du Prieuré, le film commençais à prendre vie, doucement. J'ai proposé un découpage simplifié, en mouvement, cherchant à introduire un sentiment de flottement et d'omniscience dans le travail du cadre. Très attiré par des possibilités qu'il ne pensait pas envisageables dans notre économie, Guillaume m'a suivi dans ces propositions.

Nous souhaitions une lumière peu expressionniste, à l'exception de quelques séquences choisies. Pour tenter de caractériser l'image, j'ai pensé à ma perception d'une journée d'automne froide et ensoleillée. Une palette de couleur vive mais restreinte, légèrement pastel, une lumière du jour douce peinant à atteindre tous les interstices des intérieurs. Des nuits sombres. Des pointes de chaleur conférant au lieu ce côté familier que peut avoir une vieille bâtisse en marge de tout.

Le tournage n'a pas été une mince affaire, un programme dense nous occupant chaque jour. La mise en scène précise et très dialogué a demandé un temps d'adaptation. Surtout dans sa confrontation avec notre décor : ce lieu inspirait l'ambiance d'une pièce de théâtre. Tourner dans le désordre semblait vraiment contre-intuitif. Notre plan de travail, dicté en partie par de fortes contingences techniques, était un sacré casse-tête.

J'ai trouvé qu'il s'agissait d'un challenge des plus plaisants, prenant beaucoup de plaisir à tenter de synthétiser au maximum notre travail de l'image pour fluidifier la mise en scène. Je ne pense pas y être tout le temps parvenu mais c'était extrêmement stimulant. Malgré les difficultés, il y a eu un vrai investissement de la pars de tous les technicien.nes et le travail de Guillaume et de ses comédien.nes est à saluer. Ainsi que celui de Marion, première assistante et véritable partenaire de galère quand il fallait réfléchir à l'organisation des journées.

Un point sur la caméra

Pour ce projet nous sommes partis avec une Arri Alexa Classic XT. Financièrement plus accessible qu'une Mini, sans désavantages majeurs, j'ai une totale confiance dans les capacité de cette caméra. Tant en tournage qu'en post-production.

Pour le reste, rien d'extravagant. Je suis resté sur une bonne vieille série de Zeiss Go, épaulée par un Angénieux 25-250. Dire que je fantasmais sur des optiques anamorphiques, malgré notre ratio 1.33 ! Le tout légèrement filtré aux Radiant Soft. Une configuration efficace. Merci à Yuntian Guan et Valentine Lastes pour leur travail derrière la caméra.

Un point sur la lumière et la machinerie

Pas mal de défis amusants en lumière sur ce film. De la nuit le jour, du jour pendant la nuit, dans un lieu pas si évident à pratiquer. Sans parler des extérieurs à toute heure et d'une journée de pluie complexe à gérer, sur laquelle j'espère une indulgence du spectateur...

Bref, des situations pour lesquelles j'ai utilisé un kit assez habituel constitué de tubes Astera, d'ampoules, de lucioles, de miroirs et de sources LED un peu puissantes. Je me suis aussi amusé avec quelques petits Mizards. En définitive, la liste où tout y passe : juste assez fournie pour ne pas trop restreindre mais qui force à rester un peu... créatif. Ça tombe bien, c'est la spécialité de mes acolytes, Claire Challet, Léo Nèti et Benjamin Jouve que je retrouvais avec grands plaisir sur ce plateau !

En terme de machinerie, c'est à nouveau chez Constance Production que je suis allé mendier une belle Elemack. Malgré tout, j'aurais adoré une dolly avec une montée-descente fonctionnelle. La mini-jib fait le job... Mais jamais simplement, l'outil n'est pas taillé pour ça. Pour le reste, quelques beaux sas, de chouettes accroches et pas mal de manutention... De quoi rendre mes deux machinos heureux : Valentin Brisseault et Thomas Alirand que je remercie beaucoup.

Une fois n'est pas coutume, merci aux Ateliers du Cinéma pour le soutien et une bonne partie de notre matériel, ainsi qu'à Pleine Image. Il s'agit aussi de remercier Antoine et Julien pour leur accueil au Prieuré — ainsi que son travail de déco pour le second.

Et bien sûr, un grand merci à Guillaume de m'avoir proposé de l'accompagner. Ainsi qu'au reste de l'équipe qui s'est donné dans une nouvelle drôle d'aventure, comme à l'accoutumée.

Les photos en N&B ainsi que la 5e et la 10e sont de Louis Mallié, merci à lui.

Ci-dessous, un extrait de mes documents de travail :